Falstaff. Giuseppe Verdi.

Oper.

Martin Markun, Kony Müller. OGB Biel.

Radio Suisse Romande, Espace 2, Magazine de la musique, début février 1991.

 

 

Falstaff est arrivé au bout du rouleau. Les joyeuses commères de Windsor l'ont déjoué, elles l'ont battu, et le gros chevalier doit avouer sa défaite.

 

(Musik)

 

Le monde l'a trompé. Les femmes se sont moquées de lui, elles refusent son amour, et Falstaff est déçu.

 

(Musik)

 

Falstaff est assis dans une cuvette, à moitié nu, le torse caché sous un linge. C'est une scène d'un grand comique, et c'est en même temps une scène d'un grand désespoir.

 

(Musik)

 

Le comique et le désespoir forment une balance subtile dans le dernier opéra de Verdi.

 

(Musik)

 

Le vieux compositeur y a développé un langage musical qui semble modeste à première vue, parce qu'il a l'air d'être proche du parlé. En vérité, les lignes sont très raffinées, même délicates.

 

(Musik)

 

Falstaff est superbe. C'est un vieux chanteur qui connaît le métier et qui sait donner ce que le rôle exige. Pour le reste du plateau, c'est plus difficile.

 

(Musik)

 

Vous l'entendez, les jeunes artistes qui entourent le personnage de Falstaff s'attaquent à un opéra qui dépasse un peu leur moyens. Un critique sévère dira donc que Falstaff à Bienne est une affaire à moitié ratée. Mais si je dis que l'affaire est à moitié ratée, je dis aussi que l'autre moitié est réussie. Alors, tranchons.

 

Du côté du raté, nous avons le manque de précision rythmique, le manque de beauté vocale, bref, l'inexpérience des jeunes chanteurs. D'autre part, nous avons le côté réussi. Et le réussi, c'est grosso modo la prestation de l'orchestre, et c'est la baguette vraiment inspirée du jeune chef Fabrizio Ventura. Par le feu, par la verve et l'italianità, l'orchestre et le chef nous dédommagent largement pour le manque d'expérience des jeunes chanteurs.

 

Ce mélange du réussi et du raté est parfaitement audible dans la fugue finale de l'opéra, où Verdi rend hommage à Bach qui lui aussi a terminé sa carrière en écrivant des fugues.

 

(Musik)

 

Falstaff à Bienne, c'est une aventure, mais une aventure qui se termine bien grâce à trois bonnes fées. La première de ces trois bonnes fées est le décorateur Kony Müller, un vieux monsieur qui trouve des solutions géniales pour nous faire oublier l'étroitesse du plateau. La deuxième bonne fée est le metteur en scène Martin Markun, un grand routinier qui, après des années de travail sur des scènes importantes, notamment celle de Bâle, s'est décidé à se consacrer aux jeunes et à leur apprendre le métier. Sa mise en scène est sobre, mais précise, et elle aide les chanteurs. Troisième bonne fée: le chanteur de Falstaff. C'est un artiste qui connaît tout du métier et qui s'en sert avec goût. Lors de la première, le rôle était donné par Francisco Valls. Il alternera avec Charles Ossola au cours des reprises. Trois bonnes fées donc pour sauver Falstaff.

 

(Musik)

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